D’Istanbul à Paris (fonds des traductions de la bibliothèque du Roi)

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Les groupements

Description

Le projet de recherche que je propose a pour objet principal les traductions effectuées à Istanbul entre 1730 et 1753 par les jeunes de langues et drogmans de France résidents à la Porte ottomane. Ces manuscrits dits du « fonds des traductions » constituent une partie importante de la collection Suppléments turcs du Département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France. Il s’agit d’un corpus de plus de 120 textes bilingues (la traduction en français est jointe au texte turc transcrit par les mêmes interprètes) qui dans la première moitié du XVIIIe siècle enrichirent énormément les collections orientales dont les débuts remontent au règne de François Ier.

Comme ces manuscrits représentent une source essentielle pour connaître le développement en France des études orientales, l’absence de recherches systématiques sur cette précieuse collection semble injustifiée. Elle nous signale, en effet, l’existence de lacunes importants dans la littérature scientifique consacrée à l’orientalisme français : celle-ci ne prend pas suffisamment en compte, et parfois même néglige totalement, l’influence qu’ont pu avoir les interprètes tant sur la constitution des collections orientales en Europe, que sur la formulation d’un ensemble d’idées et de représentations plus ou moins stéréotypées sur les Ottomans.
Le travail effectué sur ces fonds par la conservatrice Annie Berthier a été sans aucun doute très précieux : nous lui devons le classement et le catalogage des 11.800 manuscrits arabes, persans et turcs conservés à la Bibliothèque nationale à Paris. Sa contribution décisive a permis de reconstruire l’histoire de la constitution de ce fonds, et a soulignée aussi son importance comme source de connaissances de l’Orient en France depuis la Renaissance. Les résultats de cette recherche fructueuse ont mis à la disposition des orientalistes et des historiens de l’orientalisme des informations indispensables au progrès des études dans ce domaine. Toutefois, si le travail du conservateur constitue incontestablement un préliminaire indispensable aux études des chercheurs, ces derniers, de leur côté, sont également susceptibles de contribuer par leurs connaissances à l’étude générale de l’histoire des fonds d’archives et de leur constitution. En tant qu’experts dans tels ou tels aspects intimement liés à la trajectoire historique des manuscrits, les chercheurs sont capables d’enrichir les informations contenues dans les catalogues qui parfois présentent une description incomplète des fonds. Or, l’histoire des manuscrits orientaux est tellement complexe que les questions qu’elle soulève sont, effectivement, encore nombreuses, et les réponses qui pourront leur être données sont susceptibles d’enrichir sur des points très intéressants certains aspects qui demeurent encore imprécis ou presque inconnus.
Comme Annie Berthier l’a justement précisé à plusieurs reprises, il est important de ne pas considérer les fonds de manuscrits orientaux comme de simples réservoirs de textes de la littérature orientale, car ils sont en premier lieu des objets singuliers, qui ont chacun leur propre histoire qui peut offrir d’innombrables informations et ouvrir différentes pistes de recherche. Toutefois, l’enquête sur la première phase de leur histoire, à savoir celle de leur production en Orient, est encore peu avancée. Il s’agit, néanmoins, d’une étude essentielle qu’il ne faut pas négliger et qui a pour double but de comprendre en profondeur l’influence des traducteurs sur la constitution de ces fonds et de combler les lacunes qui existent actuellement dans la littérature concernant l’histoire de la traduction et, en particulier, les drogmans de pays européens à la Porte.
Mon objectif est ainsi d’analyser des aspects peu clairs de la constitution du « fonds des traductions » en mettant à profit les connaissances que j’ai acquises depuis ma première inscription en doctorat. Les recherches que je conduis depuis plusieurs années ont, en fait, pour objet principal l’analyse du réseau drogmanal installé dans les faubourgs latins d’Istanbul : Galata et Péra. En particulier, l’intensif et minutieux travail de recherche que j’ai pu effectuer dans les archives parisiennes m’a permis de renforcer mes connaissances sur les drogmans de France, en les appuyant sur une base documentaire que je crois très solide2