Contribution à une histoire de la vidéo des premiers temps en France (1968-1981) : pratiques militantes et expérimentations formelles

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Description

Ce projet de recherche post-doctorale entend prolonger, approfondir et élargir certaines questions soulevées dans le cadre des mes travaux de thèse en histoire et esthétique du cinéma et de l’audiovisuel, menés sous la direction de Nicole Brenez à l’Université Paris 1 puis à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, sur le sujet : « Cinéma et vidéo saisis par le féminisme (France, 1968- 1981) ».

Cette thèse étudiait les rapports qui se nouent entre cinéma, vidéo et féminisme entre 1968 et 1981 en France, sous les angles à la fois historique et esthétique, des pratiques de production/diffusion, des usages et des formes filmiques. Mai 1968 en France ouvre la voie à un renouveau du cinéma d’intervention sociale et politique et, deux ans plus tard, émerge le Mouvement de libération des femmes (MLF), un « nouveau féminisme » qui invite les femmes à lutter contre leur oppression spécifique et pour la libre disposition de leur corps et de leur sexualité. La caméra est alors investie pour accompagner et populariser les luttes féministes. Un parcours au cœur d’un corpus filmique riche, protéiforme et méconnu a permis, en thèse, de dessiner cette histoire complexe, de révéler l’impact du féminisme dans le champ cinématographique et vidéographique, et de montrer que, puissant instrument de contre-pouvoir et d’agitation directe, la caméra s’impose aussi aux femmes comme un moyen d’expression et de créativité privilégié dans leur quête d’identité individuelle et collective.

La première partie de la thèse revenait sur l’irruption de la « question des femmes » à l’intérieur du cinéma militant reconfiguré après mai 1968 : l’ouverture d’un front féministe spécifique au sein d’un cinéma orienté principalement vers la lutte des classes s’avère très limitée et parfois conflictuelle. La seconde partie interrogeait l’apparition d’une pratique féministe autonome des femmes, qui s’orientent vers une démarche politique d’auto-représentation, principalement dans le champ de la vidéo militante : s’emparer de la caméra répond alors à une exigence politique de prise de parole et de réappropriation de leur corps et de leur sexualité par l’image. Au-delà du noyau dur des films d’intervention, la troisième partie interrogeait les usages et les politiques féministes du cinéma. Elle soumettait en particulier le « cinéma des femmes » à l’épreuve du féminisme, au crible de ses théories et de ses pratiques. Dans le cadre de ce projet de post-doctorat, nous souhaitons étudier plus spécifiquement les débuts de la vidéo légère, à travers un corpus de films militants que la thèse nous a amené à rencontrer sans pouvoir l’analyser véritablement.

Ce projet se place également dans la droite filiation des travaux que nous avons menés depuis 2008 en tant que chercheuse associée puis invitée à la Bibliothèque nationale de France au sein du Département de l’audiovisuel, et qui a débouché sur la mise en place, pour l’année 2012, d’un groupe de travail sur l’histoire de la vidéo en France, réunissant praticien·nes, témoins et chercheurs/chercheuses.

Nous proposons, pour cette recherche, d’introduire la notion de « vidéo des premiers temps » – non encore usitée – et de l’instaurer comme un nouveau domaine d’investigation. L’hypothèse de départ consiste à envisager l’existence d’une possible analogie entre ce que l’historiographie a pour habitude de nommer « cinéma des premiers temps » et les débuts de la vidéo. La période du cinéma des premiers temps, c’est-à-dire antérieure à 1915, est en effet considérée comme fondatrice – et souvent mythique – par les historien·nes et théoricien·nes du cinéma: l’invention et l’expérimentation des formes et des techniques auraient alors été portées à leur plus haut degré d’effervescence, et s’y logeraient les balbutiements du langage cinématographique moderne. Quel peut être l’apport de ce paradigme pour penser les débuts de la vidéo dans les années 1960-1970 ? Le contexte « primitif » de l’émergence de ce nouveau média serait-il également favorable au développement d’innovations pratiques et esthétiques ?

Loin de viser une quelconque exhaustivité, ce projet post-doctoral est conçu comme une contribution à l’histoire de la vidéo des premiers temps en France (1968-1981), à travers l’étude spécifique d’un corpus de films militants (également baptisés d’intervention politique et sociale) tournés au cours de la « décennie rouge » en vidéo dite légère, – un corpus encore largement méconnu, voire inconnu. Ces vidéos militantes seront non seulement resituées dans leur contexte de production et de diffusion, la variété de leurs pratiques et de leurs usages, mais également mises en perspective avec d’autres réalisations (vidéos d’artistes, performances filmées, films militants argentiques…), afin d’en révéler la spécificité, en particulier la dimension expérimentale et l’inventivité formelle.


Documents disponibles

Projet de recherche Hélène Fleckinger : FLECKINGER_post-doc.pdf